The Swimmer (Frank Perry), 1968
Ned Merrill (Burt Lancaster) sort des bois vêtu d'un maillot de bain et plonge dans la piscine d'une propriété aisée du Connecticut. Accueilli par de vieux amis ravis de le trouver là, il fait part de son intention de rentrer chez lui de piscine en piscine. Au fil des rencontres avec les habitants du comté, Ned invoque un passé commun amical et s'étonne des opinions divergentes de chacun.
Film très atypique, road-movie en maillot de bain qui préfigure thématiquement le Nouvel Hollywood (le film est tourné en 66, avant Easy Rider et Le Lauréat avec lequel il partage la vision d'une bourgeoisie américaine renfermée sur elle même et sourde aux futurs bouleversements ), The Swimmer est surtout une odyssée humaine et cinématographique, par la présence monumentale de Burt Lancaster, star du Hollywood classique, qui joue ici sur son héritage filmique de séducteur (le maillot de bain qu'il porte pendant tout le film est celui de
Tant il y aura des hommes de Fred Zinnemann) pour mieux le détruire au fur et a mesure que sa vie qu'il présente comme parfaite est mise à l'épreuve des faits.
Le travail sur l'ambiance est complexe, la séquence d'ouverture quasi animiste est très déstabilisante, et les différentes rencontres au bord des piscines offrent un portrait croisé de la personnalité du héros et de ses fêlures, qui sont celles d'un peuple. Arrivés a ce point, on pourrait craindre le schématisme, le film de scénariste, les personnages-pantins chers à Boris
. Je pense que cet aspect est contrebalancé par une mise en scène discrète mais très changeante, sachant jouer sur diffèrent styles (publicitaire, onirique, gothique, réaliste) et un travail sur l'ambiance qui permet de raconter l'histoire, très elliptique, par la mise en scène et le jeu de Lancaster, monumental. Certaines séquences, comme celle de l'enfant ou de la piscine municipale, effectivement peu intéressantes sur le papier, prennent grâce à ce travail une dimension poétique ou effrayante impressionnante.
The Swimmer est un film à voir absolument si vous aimez le cinéma du Nouvel Hollywood et si vous aimez le corps musculeux de Burt Lancaster (J'ai cru comprendre que ça intéressait certains
)
Prime Cut (
Carnage en vf)(Michael Ritchie),1972
Lee Marvin va défoncer la gueule de Gene Hackman, qui a doublé les mafieux de Chicago pour monter un empire de la drogue et de la prostitution sous couvert d'abattoirs à Kansas City. Et au passage il sauve Sissy Spacek parce que y a pas de petits profits.
Vous aimez Lee Marvin? Allez voir ce film. Vous n'aimez pas Lee Marvin? Allez vous faire foutre.
Non sérieux, c'est un film qui redéfinit la notion de charisme (un peu comme
Get Carter avec Michael Caine).
Lee Marvin tabasse des gens, Lee Marvin menace le grand méchant devant ses potes, Lee Marvin va diner avec au bras Sissy Spacek en robe transparente(?), Lee Marvin kicke le bateau de son ex, Lee Marvin fait revenir l'être aimé en 24 heures payement après résultat.
Au passage, certaines scènes sont très bien filmées: l'orage avant la fin est
. Sinon, c'est assez impersonnel, mais sans fautes de gout, de la bonne série B. On a aussi une vision de l' Amérique profonde aussi subtile que celle de
Délivrance, mais en pire car institutionnalisée (les notables qui achètent des putes droguées comme du bétail).
Très bonne musique de Lalo Schifrin.
Election 1 et 2 (Johnnie To) 2005-2006
Comme tous les deux ans, l'heure est venue pour les anciens de la triade Wo Shing d'élire son nouveau président. Une sanguinaire rivalité se déchaîne entre les deux candidats à l'élection. Lok(Simon Yam), qui bénéficie du respect des oncles, est le favori. Mais son adversaire, Big D(Tony Leung Ka-fai), ne s'arrêtera devant rien pour infléchir le cours des choses, y compris remettre en cause des centaines d'années de tradition des Triades.
Ce dyptique sur les triades m'a paru plutôt laborieux au début. L'épisode 1 s'ouvre sur environ 1 heure de coups de fils et de meetings entre mafieux, et l'ennui est évité uniquement par les excellents acteurs et la scène d'arrestation de Big D. Cependant, la recherche du Sceptre permet de redynamiser le film et donne de très bonnes scènes d'action. Et j'ai été complètement pris au dépourvu par la fin: un des moments les plus forts que j'ai vu depuis longtemps.
Election 2 me semble mieux rythmé, je ne sais pas si cela vient d'avoir vu les deux a la suite, mais au lieu d'un crescendo comme le 1 ici les séquences s'enchainent plus harmonieusement et les scènes marquantes ne manquent pas, sans tout de fois surpasser l'électrochoc du 1
Thématiquement c'est du lourd. La rétrocession est arrivée, les tueurs romantiques de John Woo sont morts ou en taule, on tue au couteau ou à coup de pierre, les vieux patrons qui sont censés croire à l'honneur sont achetés ou éliminés, et même le gouvernement noyaute les triades pour maintenir le commerce.
De toute évidence ce qui se fait de mieux en film de mafia dans les années 2000.
Mulholland Drive (David Lynch) 2001
(!!!Mode Cahiers du Cinéma ON !!!)
Osef du résumé.
C'est un de ces films ou l'analyse fait défaut, ou on a juste envie de citer les scènes marquantes. C'est un patchwork qui fait jaillir les genres cinématographiques (en vrac: film policier, noir, d'apprentissage, d'horreur, d'amour, du complot, fantastique, comédie, mélodrame...) dans sa première partie, pour ensuite les tordre, les dissoudre, les déconstruire dans une deuxième partie en les heurtant, les rejouant, en abandonnant la résolution pour détruire les raccords, les genres, les idées, les images ; le cinéma? Non: il est là le cinéma, dans la démesure d'un objet tellement boursouflé de théorique, d'un flou d'images et de fictions vaines, mais qui jouent, qui rient, qui pleurent, qui baisent, qui meurent, qui pleurent, qui vivent.
C'est une histoire de fascination. Fascination cinématographique formalisée par une fascination devant l'image. C'est sans doute le film où l'union entre le fond et la forme est la plus parfaite.
(!!!Mode Cahiers du Cinéma OFF !!!)
Non, en fait, le deuxième après
Commando.
A cause d'un assassinat (
The Parallax View en vo)(Alan J. Pakula),1974
Le sénateur Caroll est assassiné devant de nombreux journalistes et l’enquête officielle conclut à l'acte d'un déséquilibré, mort en tentant de s'échapper. Pendant les 3 ans qui suivent,la plupart des personnes qui ont assisté à cet événement meurent à la suite de divers accidents.
La journaliste Lee Carter, témoin du meurtre pense que ces « accidents » sont en réalité des assassinats déguisés : elle fait part de ses craintes à son collègue Joe Frady (Warren Beatty), mais ne réussit pas à le convaincre. Cependant, quand Lee est victime à son tour d'un « accident » fatal, Joe Frady, persuadé que la jeune femme ne se trompait pas, décide, sans l'accord de son rédacteur en chef, de mener une enquête approfondie...
Chef d'oeuvre du cinéma paranoïaque des années 70, The Parallax View est un film étrange. L'enquête du héros le fait se heurter a un adversaire flou, quasi omniprésent, et sa quette de vérité et de justice est au fur et à mesure rendue dérisoire face à une organisation fantasmatique, ce qui est rendu par une mise en scène scindée en deux parties :avant l'infiltration du héros dans le complot, la mise en scène est assez classique, précise, le personnage mène l’enquête efficacement, au centre du cadre.
Puis s'ensuit une séquence dont je ne dirais rien, mais qui justifié à elle seule le visionnage du film et devrait être montrée dans toutes les écoles de cinéma. Après, la caméra se détourne du personnage, décadré, écrasé par l'architecture et de longs plans fixes ou de lointains panoramiques, dans un monde de plus en plus sombre et désincarné.
Pessimiste, porté par un Warren Beatty atone, ce film sans doute trop théorique est cependant brillant d'intelligence (quasiment tout est exprimé par la mise en scène).
Il est cependant assez daté (la coupe de cheveux du héros a volé mon âme), et il nécessite une certaine connaissance du contexte culturel de l’Amérique des 70s pour être apprécié à sa juste valeur.( tout comme
Les Hommes du prèsident ,teasing de ouf) Et la poursuite en voiture est très cheap comparé à ce qui ce faisait à l’époque, c'est le passage le plus faible du film.
La suite plus tard.