Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Dimanche 10 Février 2013 à 16:07 Hara-kiri ( Masaki Kobayashi, 1962 )
Un mystérieux rônin ( Tatsuya Nakadai ) se rend au château du seigneur Saito et formule le vœu de réaliser son suicide rituel. Avant de l’accomplir, le rônin désire raconter son histoire, histoire étroitement liée à celle du shogunat et dans laquelle Saito a joué un rôle crucial sans le savoir. Hara-kiri est une merveille de cinéma totale, absolue et tétanisante de maîtrise formelle. TOUS les plans du film sont d’une précision millimétrée et il faut quand même signaler qu’un film de 2h15 ou un homme ne fait pratiquement que raconter son histoire n’était a priori pas le projet le plus palpitant du monde ; et pourtant la science du récit de Kobayashi fait qu’on est suspendu aux lèvres du rônin, bien aidés par le talent du scénariste Shinobu Hashimoto. Que dire sur Tatsuya Nakadai si ce n’est que c’est l’un des plus grand acteurs de tous les temps ? Son mélange de violence contenue, d’intelligence et d’ironie fait de son interprétation de rônin une figure absolument mémorable de la chambara. Et que dire de l’emploi du flash-back qui n’a rien à envier à Welles ou Kurosawa : d’abord présenté du point de vue de la noblesse, la quête du jeune samouraï précédant Nakadai est progressivement rendue héroïque au point de modifier radicalement notre perception du personnage ; cette volonté d’aller explorer les faits dans toute leur complexité, de s’interroger sur ce qu’il se passe en amont avant qu’un être humain ne s’avilisse est synchrone d’une époque ou l’héroïsation des samouraïs venait d’être entamée par le corrosif Yojimbo d’Akira Kurosawa. Toutefois, là ou l’auteur de Barberousse restait dans un domaine proche de la parodie, Kobayashi charge son film de sens politique et livre une des attaques les plus sincères et frontales contre le shogunat, leçon qu’un Hideo Gosha saura retenir. Il faut à tout prix parler de la séquence du suicide à l’aide d’une épée en bois qui reste un incroyable moment de souffrance qui surprend encore aujourd’hui par sa cruauté. Et que dire d’un score minimaliste impeccable de Takemitsu Toru ( le compositeur de Ran ), de la maestria avec laquelle sont orchestrés les quelques combats du film, du sens du rythme irréprochable de Kobayashi… Hara-kiri est un chef d’œuvre, l’un des plus grands films japonais et des plus grands films tout court de tous les temps. Point. Magnifique DVD Carlotta au passage. Lincoln ( Steven Spielberg, 2012 ) Abraham Lincoln ( Daniel Day-Lewis ) tente de faire passer un amendement afin d’interdire l’esclavage au sein de la constitution américaine. Je suis franchement partagé sur ce film qui a d’ailleurs beaucoup divisé la critique. Ce qui est mauvais signe chez moi c’est quand j’aime un film plus pour ce qu’il raconte que pour la manière dont il le raconte. Ainsi le scénario de Lincoln est très intéressant, notamment dans tout ce qui concerne les petites magouilles, compromis et autres corruptions de représentants dont Lincoln fait preuve pour atteindre son but ; la scène de suspens autour du personnage de Tommy Lee Jones, qui doit renier ses convictions afin de les faire triompher, est un des plus beaux moments construits autour de cette idée et les reproches faits ici et là à Spielberg d’idéaliser son Lincoln me semble provenir de gens qui ont un petit peu de la merde dans les yeux. Quand même. MAIS visuellement je trouve que ça ne suit pas. Le traitement cinématographique ( omniprésence d’une musique franchement mielleuse de John Williams, abus de longs travellings avants sur Lincoln monologuant, solennité de l’ensemble ) me semble méchamment parasiter le script et sa longueur excessive pousse le spectateur vers l’ennui. J’ajoute que ce n’est pas parce que Daniel Day-Lewis joue sobrement qu’il joue bien - jamais son interprétation ne m’a provoqué la moindre émotion - et que Sally Field est particulièrement exaspérante dans un registre de pathos pour oscars. Si la magnifique photo de Kaminsky et le travail sur la lumière sont irréprochables, il n’en reste pas moins qu’une belle esthétique suffit rarement à captiver un spectateur. Le film est dur à suivre pour un français ne connaissant pas grand-chose à la politique américaine de l’époque ; j’espère pour vous que vous êtes plus érudits que moi. On pourrait lui reprocher de donner peu d’éléments de contexte mais au fond, je ne pense pas qu’il aurait été bienvenu d’alourdir un récit déjà suffisamment gonflé. On notera un très grand moment de cinéma - le fils de Lincoln qui suit la brouette, tout simplement génial - qui malheureusement nous fait un peu regretter que les 2h20 restantes soient très loin de ce niveau. Je n’ai pas franchement aimé ce Lincoln mais le film est beaucoup plus intéressant que ce que certains abrutis gauchisants ont pu raconter. Je vous encourage à vous faire votre propre avis en sachant qu’il est relativement difficile d’entrer dedans. Enfants de salauds ( André de Toth, 1968 ) Lybie, 1942. Le capitaine Leech ( Nigel Davenport) est chargé de détruire un dépôt de carburants allemands avec l’aide de son habituel commando ainsi que du capitaine Douglas ( Michael Caine ) ; les tensions entre les deux hommes ne font que s’accroître. Mon deuxième André de Toth après le magnifique film noir Chasse au gang est un drôle d’objet, film a priori commercial et bourrin qui m’a pourtant fait penser à certaines expériences littéraires avant-gardistes. Les héros feraient passer les Douze salopards d’Aldrich pour des grands humanistes et sont une bande d’assassins doublés de violeurs ( exceptés les deux arabes homosexuels dont la présence est pour le moins curieuse ) ; les attaques contre les allemands sont inefficaces ou inutiles, et De Toth achève son film en nous montrant qu’aussi pourris soient ses héros, leur hiérarchie est encore plus haute sur l’échelle de l’abjection, concluant Enfants de salauds de la manière la plus résolument anti-militariste possible. Pas une once de patriotisme ou de bons sentiments ici, mais quelque chose flirtant entre la farce et le théâtre de l’absurde. Du coup, en réduisant l’ennemi allemand à une présence quasiment fantomatique, De Toth tue tout aspect potentiellement spectaculaire. Ce ne serait pas un problème si le scénario était un peu plus étoffé, sa sécheresse le faisant malheureusement tourner légèrement en rond à mi-film. Dans un style tout aussi résolument anti-militariste, je trouve que le Croix de fer de Sam Peckinpah, doté d’une mise en scène plus furieuse et plus agressive, se révélait plus marquant mais cet Enfant de salauds reste doté de quelques excellents moments de cinéma comme la scène des jeeps ou la tentative de viol de l’infirmière. La présence des tronches charismatiques de Nigel Davenport et Michael Caine et la capacité du cinéaste à exploiter impeccablement le désert comme élément dramatique ne sont pas non plus parmi les moindres qualités du film, démontrant que même à un âge avancé André De Toth restait un grand cinéaste. J’ai rencontré le diable ( Kim Jee-Woon, 2010 ) Kyung-Chul ( Choi Min-Sik ), un dangereux tueur en série, a assassiné la fiancée de Soo-Hyun ( Lee Byung-Hun ). Celui-ci jure de faire souffrir le meurtrier. Dans ma critique de The Murderer de Na Hong-Jin, je m’en prenais violemment à la nullité d’un scénario que je qualifiais d’un des pires que j’ai pu voir ; au revisionnage, je me suis un peu tempéré ( l’histoire se tient à peu près, le problème étant qu’elle est très mal racontée ) et surtout, face à celui de J’ai rencontré le diable, The Murderer ressemble à du Mankiewicz. Toute la complaisance dans le sordide, tout le recours facile à l’ultraviolence et toute l’idiotie racleuse qu’on pouvait reprocher aux derniers films de Park Chan-Wook ou Na Hong-Jin est ici décuplée dans une volonté de tout montrer, de ne rien épargner au spectateur. Et que je te torture le méchant, et qu’il s’échappe, torture à son tour des gens, se fait rechopper et torturer… Je crache à la gueule de tous les connards qui se touchent la bite devant les polars coréens récents au motif qu’ils représentent une alternative salutaire au cinéma américain ; si nous présenter une histoire digne d’une chanson de Michel Sardou avec les PIRES effets cinématographiques possibles ( musique ignoble à fond, gros plan sur une tête décapitée ou sur un personnage qui arrache la joue d’un autre ) est quelque chose de salutaire, alors je laisse les trous du cul de rue89 entre amateurs de cinéma salutaire ( on n’osera pas faire remarquer que de tous les cinémas de genre au monde, le polar coréen est de loin le plus américanisé ) aller féter entre eux leur autosatisfaction et leur anticonformisme de mes couilles. Choi Min-Sik et Lee Byung-Hun sont deux excellents acteurs ici dirigés de manière catastrophique. Ca dure deux heures trente, sachant qu’au bout d’une heure la narration est calquée sur un épisode de Droopy. J’ai rencontré le diable, c’est Saw en version branchouille pour bourgeois lobotomisés aux snuff-movies, la carrière de Kim Jee-Woon étant d’ailleurs d’une remarquable constance dans le plagiat de succès récents ( A Bittersweet Life en mode polar HK au rabais net de taxe, Le bon la brute et le cinglé à la pyrotechnie débile calquée sur Pirates des caraïbes ) mais bon c’est coréen donc on vous fait passer le pire tâcheron incompétent pour un grand créateur. Un film fait par un gros con pour des gros cons. Vous serez prévenus. Docteur Jekyll et Mister Hyde ( Reuben Mamoulian, 1931 ) Le docteur Jekyll ( Fredric March ) tente de trouver une formule chimique séparant la personnalité représentant le bien de celle représentant le mal à l’intérieur de chaque être humain. Il va faire connaissance avec son double maléfique, Mister Hyde. Cela faisait longtemps que je ne vous avais pas bassiné avec un petit film de monstre, celui-ci n’étant par contre pas produit par la Universal ; cela ne l’empêche pas d’être l’une des réussites les plus notables des années 30, sans doute la meilleure en dehors des réalisations de James Whale ( Frankenstein, La Fiancée de Frankenstein, l’Homme invisible, tous au moins excellents ). D’abord, une chose marque dès la première séquence : en 1931, le parlant ne s’est popularisé que depuis un an et beaucoup de films frappent par leur statisme, je ne conseillerai qu’à mon pire ennemi de voir Junon et le paon d’Alfred Hitchcock pour constater l’étendue des dégâts. Au contraire, Mamoulian fait preuve d’une légèreté, d’une virtuosité dans ses travellings, d’une élégance dans son emploi des plans-séquences qui en font une sorte d’ancêtre de Max Ophuls. De tous les films de monstre de l’époque que j‘ai pu voir, il s’agit certainement du mieux mis en scène. C’est même là que le bas blesse, l’abus d’effets de style ( les quasi split-screen notamment ) relevant parfois d’une certaine gratuité et donnent l'impression que le cinéaste est d'abord là pour s'amuser avec sa caméra plutôt que pour créer une atmosphère ou des personnages. Fredric March compose un Jekyll théâtral et emphatique pour le moins raté, mais se rattrape avec une interprétation de Hyde réussie quoique pour le moins curieuse car Jekyll y acquiert des traits négroïdes très affirmés qui me font me demander si les ligues anti-racistes ne vont pas faire interdire le film dans dix ans. Le scénario, extrêmement osé, confronte la bourgeoisie victorienne à ses pulsions sexuelles ( Jekyll est frustré de ne pas pouvoir coucher avec sa fiancée donc Hyde va voir des putes ) et nous propose un Hyde jouisseur aussi répugnant qu’effrayant. Il est toutefois dommage que son maquillage soit moins réussi que les travaux de Jack Pierce pour la Universal. Œuvre d’esthète raffinée et plutôt subversive, Docteur Jekyll et Mister Hyde s’impose clairement parmi les belles réussites du genre durant les années 30. Boris.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 28/02/2019 Grade : [Divinité] Inscrit le 07/11/2008 | Envoyé par JiRock le Mardi 12 Février 2013 à 04:26
Plus exactement, il dit que c'est mal parce que ça ne respecte pas la réalité historique et que le film est à prendre entièrement au premier degré. Autant je ne me prononce pas sur la première critique, parce que j'ai trouvé le cadre bien reconstitué mais que je n'ai pas de connaissances particulières, autant faut être vraiment demeuré pour réduire Tarantino à un gamin qui n'a d'autre préoccupation que de foutre du sang partout. J'ai vu pas mal de questions sous-jacentes dans le film - la distinction nauséabonde entre esclaves et sous-esclaves qu'invoque Candy pour légitimer ses traitements de faveur, la relation ambigue de Django aux autres esclaves, les quelques confrontations morales entre Django et Schultz... et pour autant on ne perd jamais vraiment le rythme grâce aux dialogues croustillants, aux scènes sanglantes, mais surtout, surtout à la tension. Y a une putain de tension palpable quasiment tout le temps. C'est ce qui fait le mieux passer les 2h40 que durent le film, malgré un relâchement dans les dialogues par moments. Je crois que comme toute oeuvre produite par un vrai artiste, c'est difficile d'analyser Django Unchained sur un seul angle (anyway, ce n'est pas mon intention de faire une analyse, je rebondis juste sur ce qui a été dit). En tout cas, je trouve au film un côté onirique, surréaliste. Comme le rêve agité qu'un esclave aurait pu faire après avoir été fouetté au sang, ou le cauchemar d'un planteur psychopathe comme celui joué par Di Caprio. Oui, j'ai reçu des coups de poing devant la brutalité, l'effet réaliste de plusieurs scènes, mais ce n'est pas le genre de cinéma devant lequel il faut s'attendre à voir sa mentalité caressée dans le sens du poil. Tarantino VEUT choquer, ça se voit comme une mare rouge dans la poudreuse, et et quoi que prétende Finkelkraut, il faut avoir des idées préconçues vachement solides pour ne pas le remarquer. JiRock, j'ai essayé d'effacer mes spoils faute de connaître la balise, désolé s'il en reste. Et +1 pour les voix à grincer des dents des deux djangophobes.
___________________ "My ancestor Toshiro used to say, 'Life is a series of choices between bad and worse'. I'm a master of making great bad choices."
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Hors Ligne Membre Passif depuis le 03/07/2023 Grade : [Modo Forum] Inscrit le 22/08/2003 | Envoyé par jokerface le Samedi 16 Février 2013 à 22:24 Je débarque de ma grotte, je viens d'apprendre qu'il va y avoir un film sur superman cet été : man of steel.
www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=123348.html Vous le saviez vous ? Parce que jai pas eu l'impression qu'il y ai eu tellement de pub à ce sujet. Faut dire que Superman Returns etait vraiment pas terrible, alors ils se sont fait peut etre discret. En tout cas j'irai pas le voir. Autant j'aime bien les trois premiers de Cristopher Reeve( le 4 je l'ai vu une fois javais 6 ans et je rn'en rappelle à peine) autant le perso de superman m'a toujours emmerdé. C'est probablement le héros que je trouve le moins interessant. Edit : je viens de voir la BA et faur reconnaitre qu'elle a de la gueule. www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19450537&cfilm=123348.html Et l'acteur qui fait super est plutot ressemblant. Après faut voir son jeu , super est plutot psycho rigide, l'acteur je sais pas trop ce qu'il vaut.
[ Dernière modification par jokerface le 16 fév 2013 à 22h33 ]
___________________ Le 23/02/2017 à 16:10, David avait écrit ... |
Hors Ligne Modérateur Actif Modération : News, Arts, Cartes, Regles, Articles Grade : [Modo Forum] Inscrit le 27/04/2006 | Envoyé par Xins le Mercredi 20 Février 2013 à 22:19 J'étais au courant pour le nouveau Superman.
Mais je viens de voir Cosmopolis. Quelqu'un pourrait simplement me dire "Pourquoi" ? Pourquoi ce film existe ? Pourquoi je me suis tant ennuyé ? Pourquoi je n'ai trouvé aucune structure digne d'intérêt ? Je suis triste. J'ai eu la force de mettre le titre du film en gras... Étonnant.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Mercredi 20 Février 2013 à 22:28 Il y a quelques fans ici - gedat avait aimé il me semble - qui pourront sans doute t'expliquer ou ils y voient un intérêt, pour ma part il s'agit de loin de ce que j'ai vu de pire de Cronenberg et d'une des arnaques cinématographiques les plus imbitables de ces dernières années. Le livre est meilleur sinon, alors que le film est globalement fidèle. Il faut dire que l'accumulation de dialogues et de conversations ésotériques passe très mal au cinéma, surtout quand comme ici il y a un jeu de contrepoints dans le livre ( les flash-forward avec Benno Levin, les pensées du narrateur ) qui est absent de l'adaptation. Une preuve - de plus - que ce qui fonctionne en littérature ne suffit pas à faire un bon film. Boris.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Jeudi 21 Février 2013 à 17:52 L’Enfer - Jigoku ( Nobuo Nakagawa, 1960 )
Shiru ( Shigeru Amachi ), un jeune étudiant japonais, compte se marier bientôt. Alors qu’il est en voiture avec son ami Tamara, celui-ci renverse et tue un yakuza ; c’est le début d’un cauchemar qui se terminera au fond de l’enfer. Le plus réputé des films de Nakagawa se divise en deux parties très distinctes : d’abord, pendant une heure, l’intrigue se met en place à grands renforts de personnages secondaires venant renforcer le sentiment de damnation autour de Shiru ; puis, durant environ 40 minutes, Shiru et ses amis sont punis de leurs crimes aux enfers. La première partie est franchement chiante. Les acteurs sont moyens, les situations virent de plus en plus au grotesque jusqu’à un carnage final qui prête plutôt à rire et surtout, la misanthropie du cinéaste fait qu’on peine à voir dans ses personnages autre chose que des pantins voués à montrer à quel point l’humanité est irrécupérable. Ce nihilisme factice trouvera sans doute des amateurs mais pour ma part j’y vois surtout le point de vue d’un vieux con. Une chose sauve toutefois cette partie du ratage absolu : la science du cadrage et de la mise en scène de Nakagawa, irréprochable, et dont l’aspect théâtral n’est pas gênant puisqu’il s’accorde relativement bien avec son sujet. Les scènes de crescendo dramatique sont les meilleures car elles mettent en évidence la rigueur et la précision du cinéaste. La deuxième partie est totalement baroque. On lira ici et là des comparaisons avec Lynch, tarte à la crème du surréalisme, mais l’univers me parait plus proche de celui de Jodorowsky ; quoi qu’il en soit, cette suite de moments de poésie gore déjantée, de visions sorties des livres de Dante et d’idées picturales délirantes rehausse considérablement l’intérêt du film et parvient même à s’affranchir de la narration ( on a une bonne demi-heure de tortures ) en captivant le spectateur par la beauté et la folie de ses images. J’ai choisi intentionnellement de ne faire de captures d’écran que durant cette partie dans la mesure ou c’est celle-ci, et uniquement celle-ci, qui fait de l’Enfer un film marquant. A chacun de choisir : une grosse demi-heure de génie précédé d’une heure d’ennui, que cela donne t-il ? Pour moi, un film très très inégal mais dont les fulgurances justifient largement le visionnage. Gangster Squad ( Reuben Fleischer, 2013 ) Dans les années 50, Mickey Cohen ( Sean Penn ) règne sur Chicago. Le sergent O’Mara ( Josh Brollin ) est chargé de monter une brigade officieuse pour lutter contre Cohen, avec notamment le sergent Wooters ( Ryan Gosling ), qui entretient une liaison avec Grace ( Emma Stone ), une protégée de Cohen. Ganster Squad n’est pas totalement irregardable. Ici et là, un gunfight réussi, un mouvement de caméra plaisant, une belle idée de mise en scène ou quelques plans iconiques surnagent. Ryan Gosling émerge sans problème d’un casting navrant, ou Emma Stone joue une insupportable potiche en version pouffe d’Ava Gardner, ou Josh Brollin incarne - mal - un héros qu’on a envie de voir mourir très vite et surtout ou Sean Penn nous gratifie de la pire imitation de Benoit Magimel imitant Robert De Niro possible. Arrêtons avec l’attitude française excessivement bienveillante envers Sean Penn, livré à lui-même il peut devenir une vraie catastrophe ambulante et ici, il flingue tout bonnement chaque scène ou il apparaît, celles-ci virant systématiquement au comique involontaire. Thématiquement comme visuellement, il s’agit d’un plagiat des Incorruptibles de Brian De Palma. Curieusement, là ou d’autres réalisateurs auraient plutôt plagié en début de film pour ensuite mieux dériver dans des directions personnelles Fleischer fait quant à lui l’exact contraire et a l’idée désastreuse d’amplifier sans arrêt le sentiment de déjà vu ; et lorsque Gangster Squad ose faire lors de son climax une fusillade dans un escalier avec un des héros lançant à son copain un chargeur au ralenti alors qu’un méchant se rapproche, on a VRAIMENT le sentiment qu’on se fout de notre gueule. Et il faudra m’expliquer l’utilité de la mention " inspiré de faits réels " quant on sait que Mickey Cohen a été en prison… pour fraude fiscale ( dans le film c’est pour meurtre ) et que rien n’indique qu’il ait un rapport avec la mort de Jack Dragna. Un film tout bidon. Les chevaux de feu ( Serguei Paradjanov, 1966 ) Ivan ( Ivan Nikolaïtchouk ) et Maritchka ( Larissa Kadotchnikova ) ont grandi ensemble en dépit de la haine que se vouent leurs familles respectives. Plus tard, ils décident de se marier, mais alors qu’Ivan part travailler l’hiver comme berger, Maritchka se tue en cherchant à le rejoindre. Résumer toute l’histoire du film ne vous avancerait en rien car Les chevaux de feu véhicule beaucoup plus de choses par sa mise en scène que par son récit. Pour tenter de le résumer, mélangez la vision de la nature du Tarkovski des débuts avec les plans-séquences du Kalatozov de Soy Cuba, avec un zeste d’Emir Kusturica avant l’heure ( les faciès grotesques, l’omniprésence des rituels et de la fête, la petite communauté ). On a l’impression que le film parvient à concilier deux esthétiques a priori opposées, le documentaire ( la caméra se faufile partout, elle est sans cesse en mouvement et passe d’un personnage à l’autre sans justification narrative ) et la fable. D’où une œuvre pas franchement facile d’accès et surtout pour un public peu habitué au cinéma d’Europe de l’est mais en même temps tellement vivifiante, pleine d’énergie et de fantasmagorie qu’elle représenta l’antidote le plus extrême aux canons du réalisme soviétique ( qui eut d’ailleurs la peau de Paradjanov ). Le misérabilisme de l’histoire est ainsi désamorcé par l’esthétique flamboyante du cinéaste. J’aime beaucoup aussi qu'e, dépit du fait que l’histoire soit comparée systématiquement à celle de Roméo et Juliette, elle s’en singularise par l'idée que le personnage féminin est évacué assez vite du récit avec la nécessité pour Ivan de réintégrer le monde normal : deuil, dépression puis mariage de raison, tentative de faire un enfant… Je trouve que Les chevaux de feu accuse un petit coup de mou autour des passages dépressifs mais les dernières scènes font partie des plus belles. Certaines fulgurances visuelles comme le coup de hache sur la caméra qui fait naître le générique du film en lettres de sang touchent au sublime ; c’est aussi une des rares œuvres ou le passage de la couleur au noir et blanc ne m’a pas semblé être uniquement un procédé esthétisant mais raccord avec l'évolution spirituelle du personnage. Une petite merveille de cinéma soviétique. Mortorway ( Soi Cheang, 2011 ) Un jeune policier au sang chaud ( Shawn Yue ) cherche à attraper un duo composé d’un braqueur et de son complice, chauffeur hors pair. Il apparaît que son équipier ( Anthony Wong ), un vieux flic quasiment à la retraite, a déjà eu affaire au chauffeur en question. La plupart des accroches vendant Motorway le comparent à Fast and Furious ; le seul point commun entre les deux films est qu’on y trouve des voitures. A la testostérone, la frime et l’attitude bling-bling du Rob Cohen se substitue ici un calme, une sérénité qui culmine dans un climax ou le héros ne cherchent pas à faire du 300 à l’heure sur l’autoroute mais… à prendre un virage à précisément 2 km/h dans une ruelle à peine plus largue que sa voiture ! Les comparaisons à Drive sont déjà plus pertinentes, surtout concernant l’atmosphère de Motorway. Plagiat ? Difficile à dire, sachant que les studios Milkyway, dont la patte est extrêmement reconnaissable ici, travaillent dans des directions similaires depuis la fin des années 90 comme en témoignent les beaux films de Johnnie To et Patrick Yau. Quoi qu’il en soit, si l'ambiance visuelle et sonore est tout à fait plaisante, il n’en demeure pas moins que Soi Cheang n’est pas à la hauteur de ses prédécesseurs ; ses scènes de poursuite sont confuses, la seule fusillade du film l’est encore plus. Comme dans Accident, première collaboration de Soi Cheang avec la Milkyway, un script extrêmement intéressant pâtit du talent limité de son réalisateur ( ainsi on ne comprenait foutrement rien à l’accident final du film du même nom ). Autre problème, les acteurs. Shawn Yue est un peu meilleur que d’habitude mais peine à composer un héros réellement charismatique. Au contraire, le génial Anthony Wong en mentor semble ici pour le moins éteint et ne délivre pas, loin s’en faut, l’une de ses meilleures interprétations. Enfin, les personnages féminins sont dignes du pire du cinéma HK, je préfère ne pas en dire plus. Dommage car sur beaucoup d’autre points ( le traitement des méchants, la relation entre Shawn Yue et Anthony Wong, la volonté de montrer la poursuite comme un face à face d’abord psychologique ) Motorway se révèle franchement réussi. Série B tout à fait sympathique, techniquement soignée et thématiquement intéressante, Motorway est bien plus qu’un Fast and Furious asiatique. Sans être ce que la Milkyway a engendré de meilleur, il reste l’une de leurs meilleures productions depuis Exilé. L’Auberge du dragon ( Raymond Lee, 1992 ) Sous la dynastie Ming, l’eunuque Tsao ( Donnie Yen ) fait régner la terreur. Son principal ennemi est Chow Wai-On ( Tony Leung, celui de l’Amant donc pas celui d’In the mood for love ), secondé par la guerrière Mo-yan ( Brigitte Lin ). Chow Wai-On, Mo-yan et leurs hommes trouvent refuge dans une auberge dirigée par l’étrange Jade ( Maggie Cheung ). L’un des films favoris de kakkhara il me semble et certainement un des meilleurs films de sabre chinois des années 90, rempli d’énergie jusqu’à ras bord et se foutant du réalisme comme d’une guigne. On a pratiquement l’impression de voir un film en accéléré tellement tout va très vite alors que curieusement, les séquences les plus marquantes sont aussi les plus posées : le déshabillage mutuel entre Brigitte Lin et Maggie Cheung ( l’un des plus grands moments érotiques de tout le cinéma HK ), le mariage entre Tony Leung et Maggie Cheung ou encore la scène ou Brigitte Lin se fait soigner. Le gentil yes man Raymond Lee, officiellement aux commandes, a en réalité été l’homme de main du producteur Tsui Hark et du chorégraphe Ching Siu-Tung dont on reconnaît clairement le style. Sinon, il s’agit d’un remake d’un King Hu que je n’ai pas vu ; on retrouve toutefois un certain nombre d’éléments représentatifs du cinéaste ( l’eunuque maléfique, la guerrière androgyne, les auberges pour piéger l’ennemi ) mais repris à la mode 90’s, frénétique et déjantée. Un autre élément typique de Tsui Hark est le rôle déterminant des femmes dans l’histoire ainsi que l‘approfondissement de leur psychologie, qui parviennent à éclipser un Tony Leung pourtant irréprochable. Brigitte Lin est formidable, autant dans l’action que dans les séquences d’émotion, tandis que le personnage de nymphomane bisexuelle hystérique de Maggie Cheung est tellement outrancier qu’on se prend très vite à l’adorer. Et pour le coup la musique est excellente. Deux défauts : d’abord, je trouve que parfois le cinéaste ( mais est-ce Lee, Tsui hark ou Ching Siu-Tung ? ) confond vitesse et précipitation et la lisibilité de certains combats laisse à désirer. Ensuite, même si l’idée d’une catharsis dans l’auberge est très bonne, il s’écoule un peu trop de temps avant le combat final, temps durant lequel L’Auberge du dragon finit par n’avoir plus grand-chose à raconter avant que l’affrontement Donnie Yen contre tout le monde ne vienne conclure ce grand spectacle martial en apothéose. Imparfait mais cumulant tout ce que je peux aimer dans le cinéma HK de l’époque, donc indispensable. Boris, trois heures à faire des captures, je crois que c'est mon record.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 04/08/2021 Grade : [Nomade] Inscrit le 03/02/2012 | Envoyé par Supplice le Samedi 23 Février 2013 à 11:47 L'auberge du Dragon, film que j'ai du acheté dans une autre zone PAL pour mon lecteur DVD Zone 1...
Je ne sais même pas s'il existe en zone 2... Mais très bon film, mais comme beaucoup de bons films, pas beaucoup de monde les conaissent ^^
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Samedi 23 Février 2013 à 11:53 Il existe dans une seule édition à ma connaissance, le coffret " Maggie Cheung - créature célèste " édité par HK video et contenant également le Green Snake de Tsui Hark. Ce coffret est épuisé depuis des lustres et ne se trouve que d'occasion à des prix absoluments prohibitifs, ce qui est un début d'explication concernant le fait que peu de monde le connaisse ( hors amateurs de ciné HK ). Boris, pour ma part, la façon dont j'ai pu le voir n'est pas à proprement parler légale...
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Mardi 05 Mars 2013 à 14:35 Lone Star ( John Sayles, 1996 )
Le shérif Sam Deeds ( Chris Cooper ) retrouve un corps abattu des décennies auparavant. Il découvre que son père, le légendaire Buddy Deeds, pourrait être impliqué dans le meurtre. C’est le film le plus célèbre de John Sayles en France et alors que son réalisateur en est actuellement à 18 longs métrages, il me semble que c’est le seul à disposer d’un DVD digne de ce nom ; voilà qui laisse rêveur et qui illustre bien l’absence d’intérêt des distributeurs envers le cinéaste. Au vu de Lone Star, ce désintérêt est totalement immérité. Lone Star est un très beau film. Pas forcément fan des films choraux qui ont pu donner ces dernières années quelques sommets de lourdeur, ici l’empathie du réalisateur pour tous ses personnages, sa capacité à aborder la question raciale sans gros sabots et sa mise en scène classique mais sans esbroufe font de Lone Star un film un peu anachronique, proche des grands films de Clint Eastwood dans sa vision de l’Amérique. On y suit donc une multitude de personnages ( un vieux barman noir, une institutrice espagnole, un colonel de l’armée et notre jeune shérif notamment ) gravitant autour d’une enquête concernant le meurtre d’un ancien shérif corrompu et raciste. Ce fil conducteur permet en réalité à Sayles de brosser le portrait d’une petite ville multiculturelle, avec les tensions induites par la barrière raciale et les secrets enfouis. Rarement narration éclatée n’a été aussi claire ( la façon dont les flashbacks sont introduits est exemplaire ) et la lenteur de son déroulement épouse très bien le rythme de l’enquête. Au sein d’un casting exemplaire se distingue le très beau couplé de cinéma formé par Chris Cooper et Elizabeth Pena, la dernière scène entre eux rappelant par ailleurs les dilemmes moraux du Décalogue de Kieslowski. Mes deux seules réservent résident dans le traitement un peu trop appuyé que le scénario réserve au personnage de Kris Kristofferson, fumier intégral, et dans la scène entre Frances McDormand en ex-épouse hystérique et Chris Cooper qui aurait gagné à être raccourcie. Lone Star n’en demeure pas moins un magnifique polar humaniste. She-Wolf of London ( Jean Yarbrough, 1946 ) Phyllis Allenby ( June Lockhart ) est convaincue qu’une malédiction familiale pèse sur elle et fait d’elle un loup-garou lors des nuits de pleine Lune. Alors que les meurtres se multiplient, Phyllis se sent basculer progressivement dans la folie. En 1946, tous les studios Universal ont abandonné l’idée de faire un film de monstre regardable. Tous ? Non ! Un illustre inconnu nommé Jean Yarbrough crée le premier film de loup-garou sans loup-garou, idée qui aurait peut-être pu donner quelque chose d’intéressant entre des mains un peu plus expertes mais qui ici mène à une impasse et à un résultat qui ne se regarde qu’avec un ennui croissant. Le seul aspect qui fait que ce She-Wolf of London est un peu moins pénible que l’inaugural Le Monstre de Londres de Stuart Walker, c’est qu’on échappe à l’humour polio qui plombait celui-ci. L’intrigue est effroyablement nulle et prévisible. Heureusement que le film ne dure qu’une heure car on passe déjà les trois quarts de sa durée à attendre des évènements annoncés par des signes que même Kiwi saurait détecter. La romance entre l’héroïne et le riche avocat est d’une platitude confondante, les personnages unidimensionnels et puis merde je le répète il n’y a même pas de loup-garou ! Même dans les plus pourris des films de monstres que j’ai vu, il y avait au moins un monstre pour maintenir un tant soit peu l’intérêt, pas seulement une gamine pleurnicharde et vaguement schizo pour laquelle Yarbrough a toutes les peines du monde à nous faire ressentir autre chose que de l’exaspération. La résolution est d’ailleurs à l’image du reste : bâclée et fade. Le gros problème, c’est qu’on nous parle de loup-garou alors que cela pourrait être n’importe quoi d’autre ; quitter le domaine du film de monstre pour entrer dans un cinéma d’angoisse plus psychologique, ça a déjà été fait avec mille fois plus de talent du côté des productions Val Lewton, contemporaines à ce film. Au final, il ne reste pas dans ce lénifiant produit d’attrait ou de singularité qui pousserait le spectateur moderne à la moindre magnanimité. En 1946, les films de monstres ne le savaient pas encore, mais ils étaient déjà morts. La Féline ( Jacques Tourneur, 1942 ) Irena ( Simone Simon ) rencontre Oliver ( Kent Smith ) et ils tombent amoureux. Irena est convaincue qu’une malédiction liée à ses ancêtres serbes la transforme en panthère. Premier film à la fois pour le talentueux Jacques Tourneur mais aussi pour le producteur Val Lewton, la Féline est certainement la plus connue - et l’une des meilleures - des productions de ce dernier. Il fit date dans l’histoire du fantastique par son aspect " suggéré " dont on peut admirer la descendance chez un cinéaste comme Shyamalan aujourd’hui ; a cet égard, plusieurs scènes de la Féline ( la fuite dans la piscine, l’arrivée du bus, l’achat de l’oiseau ) sont d’immenses moments de mise en scène ou le moindre détail insignifiant est employé comme un élément de terreur, des décennies avant Lynch et son portable de Lost Highway. Je trouve que tout cet aspect fantasmagorique et cette ambiance dépressive voir suicidaire seront réutilisés de manière encore plus approfondie dans le moins célèbre La Septième Victime ; pour autant, la Féline se démarque d’autres productions Lewton par le caractère extraordinairement attachant de son héroïne ( Simone Simon est impériale ). Car la Féline n’est pas qu’un film d’horreur irréprochable techniquement, il est aussi un magnifique mélodrame sur une femme esseulée, devant progressivement étrangère à son propre mari en plus de l’être à son environnement. Ainsi, le personnage masculin, pourtant dans son bon droit théoriquement - reconnaissons que sa femme est folle - devient insupportable par son indécision et sa froideur, reportant l’affection du spectateur sur une Simone Simon pourtant a priori peu propice à suggérer l’empathie. Ce renversement des valeurs, cette capacité à mettre le spectateur en synchronisation avec le personnage aliéné fait que la Féline demeure aussi fascinant aujourd’hui qu’à sa sortie. Métaphoriquement, la transformation d’Irena en panthère représente une sorte d’exacerbation de sa féminité, exacerbation qui poussera son insignifiant mari dans les bras d’une autre, effrayé qu’il est par la complexité de sa femme ( il avouera n’avoir jamais connu de vrais problèmes dans sa vie ). Le personnage du psychologue ( le même que dans la Septième Victime ), homme à femmes visiblement attiré par des figures plus complexes, ne s’y trompe d’ailleurs pas et n'essaye jamais de dissimuler son attirance pour Irena. D’un côté le monde des gens trop propres ( le mari d’Irena et sa collègue ), de l’autre celui des figures tourmentées et de leurs admirateurs. La Féline, ou la tentative vouées à l’échec de s’intégrer dans un monde qui ne veut pas de nous. Un chef d’œuvre auquel ma critique peine à rendre l’homme qu’il mérite. Seven Swords ( Tsui Hark, 2005 ) Durant la Chine médiévale, tous les pratiquants des arts martiaux se font massacrer sur ordre de l’empereur. Un village cherche de l’aide et ce sont 5 guerriers et 2 paysans qui s’en vont se battre. Ce que j’adore chez Tsui Hark, c’est qu’il fait du cinéma exactement comme je joue au LG : avec une mégalomanie absolue, une envie constante de montrer à tout le monde qu’il est le plus fort et que les autres sont des taches ; dans Time and Tide, il raillait le succès commercial de John Woo et celui festivalier de Wong Kar-Wai en parodiant leurs esthétiques. Ici, ce sont Ang " Tigre et Dragon " Lee et Zhang " Hero " Yimou qui se font tailler un costard, le Moyen-Age selon Tsui Hark étant autrement plus barbare, violent mais aussi sexué que les couillonades académiques que la critique de l'époque couvrait d'éloges. Les combats sont bourrés d’inventivité ( les armes des méchants sont plus délirantes les unes que les autres ), l’alchimie entre les acteurs-chorégraphes Donnie Yen et Liu Chia-Liang d’un côté et Tsui Hark de l’autre passant impeccablement, avec quelques très très grands moments d’action n’ayant pas grand-chose à envier au chef d’œuvre du genre, le The Blade du même Tsui Hark dont il reprend globalement l’esthétique. C’est d’ailleurs un des gros défauts du film : reprendre l’ambiance de The Blade et Charlie Young l’actrice de The Lovers, pourquoi pas ; le problème étant que l’esthétique barbare peine à trouver une cohérence et que Charlie Young joue comme une patate, tout comme Leon Lai ; quant à Donnie Yen et Liu Chia-Liang, si ils assurent impeccablement question combats, leur talent de composition est plus limité ( heureusement, ils sont d’abord là comme des figures mythiques et leur présence physique compense largement ). Seven Swords devait durer 4 heures, il fut ramené à 2 et le moins qu’on puisse dire et que ça se ressent. Des personnages passent totalement, mais alors totalement à la trappe ( celui de Mulang et son ami qui a été élevé par les loups, on en viendrait presque à oublier qu’ils sont dans le film ), et on se prend à essayer de combler les trous dans le scénario. Et j’ajoute que Kenji Kawai est définitivement le Howard Shore japonais : excellent lorsqu’il compose des musiques minimalistes, il devient proprement insupportable lorsqu’il tente d’imiter Hans Zimmer, rendant la bande-originale du film pour le moins fatigante. Génial le temps de quelques fulgurances, Seven Swords se perd en route à force d’ambition thématique beaucoup trop forte et de volonté de cumuler des triangles amoureux, l’idée du lien entre le combattant et son épée, la relation fraternelle entre le méchant et Liu Chia-Liang etc etc. On dirait que Tsui Hark ne sait pas s’arrêter et veut donner beaucoup trop de choses en beaucoup trop peu de temps ; ce parti-pris a beau faire du mal à Seven Swords, il en fait également un film profondément sympathique au-delà de ses nombres défauts. En résumé, c’est bancal, inégal mais quelque part la profusions d’idées et le génie de la mise en scène de Tsui Hark sauve largement les meubles. La vérité sur Bébé Donge ( Henri Decoin, 1951 ) François Donge ( Jean Gabin ) a été empoisonné. Comme tout le monde, il sait que sa femme Elisabeth, alias Bébé ( Danielle Darrieux ) est responsable mais il ne semble pas lui en tenir rigueur. Au contraire, il n’a qu’un désir : s’excuser auprès de celle-ci pour l’avoir faite souffrir. Tout l’univers de Simenon est là : le crime dont l’intérêt n’est pas le qui mais le pourquoi, la bourgeoisie hypocrite et ceux qui en souffrent, la relation de couple se détériorant petit à petit. Decoin se saisit d’un scénario très riche qu’il raconte à l’aide de flashbacks, très influencé dans sa construction par Citizen Kane. Petit problème, Decoin n’est pas Orson Welles et là ou celui-ci faisait preuve d’une incroyable maîtrise dans sa construction narrative, ici Decoin semble beaucoup plus confus et nous perd plus d’une fois dans sa suite d’allers et retours temporels s’enchaînant plus ou moins bien. Je lui reprocherai aussi de tirer en longueur sur la fin, Decoin peinant à à conserver tout à fait la sécheresse au cœur de l’univers de Simenon. Pour autant, La vérité sur Bébé Donge est loin d’être dénué de qualités. L’histoire s’en prend plus que frontalement à l’arrivisme et à l’obsession de la réussite sociale ( ainsi l’un des personnages répète chaque année à Danielle Darrieux qu’elle est radieuse alors que le spectateur est conscient de son dépérissement progressif ). Les interprétations de Jean Gabin et Danielle Darieux sont absolument bouleversantes et lors de la toute fin, Decoin se révèle un styliste tout à fait correct lors de leurs séquences d’adieu. Rarement un film " féministe " n’a été aussi intelligent, en partie parce qu’au lieu de se contenter de prendre en pitié son héroïne, il fait de celle-ci une femme s’endurcissant et s’asséchant progressivement sous l’influence de son milieu social jusqu’au stade ou la vie de son mari n’a plus aucune importance pour elle. La haine s’est progressivement changée en indifférence et la performance de Darrieux dans l’évolution de son personnage mérite tous les éloges ( je tiens quand même à préciser que je suis amoureux d’elle et dénué d’objectivité la concernant ). Un des films illustrant le mieux la noirceur du cinéma français de l’après guerre, une belle adaptation de Simenon qui pâtit un peu des limites du metteur en scène mais demeure une réussite pour son histoire et ses acteurs. Boris.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 27/02/2017 Grade : [Nomade] Inscrit le 18/06/2010 | Envoyé par NewMilenium le Samedi 09 Mars 2013 à 12:52 Hier soir, j'ai vu Wanda, de Barbara Loden, avec ensuite discussions avec Nathalie Léger, qui a écrit Supplément à la vie de Barbara Loden (qui a obtenu le prix Livre Inter 2012). J'ai l'impression qu'on peut trouver que c'est un chef-d'oeuvre génialissime comme on peut trouver que c'est une bouse incroyablement chiante, alors si quelqu'un l'a vu, genre Boris, avant que je ne me lance (ce soir, sûrement) dans une loooongue tirade...
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Samedi 09 Mars 2013 à 16:49 Présent. Vu le film il y une éternité, pas lu le livre sur Loden par contre. Pour ce qui est de Wanda, je l'avais vraiment perçu à l'époque comme un de mes portraits de femme cinématographiques favoris, dans une sorte d'esprit 70's entre John Cassavetes et la contre-culture de l'époque, type de cinéma auquel j'adhère beaucoup en dépit ( ou du fait ) de sa fragilité. Grosse performance de l'actrice-réalisatrice dans son rôle.
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Hors Ligne Modérateur Actif Modération : News, Arts, Cartes, Regles, Articles Grade : [Modo Forum] Inscrit le 27/04/2006 | Envoyé par Xins le Samedi 16 Mars 2013 à 20:41 Aujourd'hui, j'ai vu Le Secret de Brokeback Mountain. Bizarrement, j'ai aimé. Pourtant, je ne cours pas après le melon au jambon...
J'ai aussi lu un article en hommage à Nagisa Oshima et j'aimerai découvrir son oeuvre. À moins que vous m'arretiez de suite ; Positif en a peut-être fait trop d'éloge ?
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Mercredi 20 Mars 2013 à 23:13 Je connais très très mal Oshima mais quoi qu'il en soit, je peux t'assurer que Positif n'est pas la seule revue à en penser du bien.
Un petit RIP avec du retard pour Damiano Damiani, cinéaste italien de gauche spécialisé dans le polar et qui avec El Chuncho avait réalisé l'un de mes westerns italiens favoris. Les cinéastes du genre disparaissent les uns après les autres et ne restent plus guère que Sollima et Castellari encore en vie. Boris.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 15/08/2024 Grade : [Nomade] Inscrit le 23/04/2004 | Envoyé par Borislehachoir le Mardi 26 Mars 2013 à 13:53 Green Snake ( Tsui Hark, 1993 )
Serpent Blanc ( Joey Wong ) et sa servante Serpent Vert ( Maggie Cheung ) sont deux serpents se faisant passer pour des femmes pour se lancer à la rencontre des hommes. Un moine bouddhiste ( Chiu Man-Cheuk ), traqueur de créatures surnaturelles, est bien décidé à les renvoyer à leur ancienne condition. J’admets, le résumé laisse au mieux songeur. Les effets spéciaux laisseront encore plus circonspect le spectateur moderne à grands renforts de serpent en mousse et de cigogne magique en plastoc ; tout cela n’empêche nullement Green Snake d’être une merveille et le plus beau film asiatique que j’ai pu voir depuis Hara-Kiri. Le charme extraordinairement érotique du duo Maggie Cheung/Joey Wong, le thème musical de James Wong aussi entêtant que celui qu’il avait réalisé pour Histoire de Fantômes chinois ( deux films assez proches tant visuellement que thématiquement ), et la formidable énergie de la réalisation de Tsui Hark, évitant l’académisme fréquent des productions aussi travaillées esthétiquement, en font un spectacle de tous les instants. Ce qui est incroyable chez Tsui Hark c’est sa capacité à renverser une idéologie l’air de rien ; ici il adapte une ancestrale légende chinoise comme pour The Lovers mais transforme le conte originel en manifeste féministe et anti-religieux ( le moinde bouddhiste censé représenter la morale est antipathique et inintéressant, son homologue taoïste est quant à lui ridiculisé à chaque apparition ) et ou le mal supposément représenté par les personnages de Maggie Cheung et Joey Wong apparaît bien plus confus, plus diffus ; la confrontation finale entre Maggie Cheung et Chiu Man-Cheuk mis face-à-face avec ses contradictions par la femme-serpent est absolument bouleversante. Une fois acceptés les excès inhérents au cinéma de Hong-Kong, reste une incroyable force poétique et un visuel impeccable. Pour peu que l’on accepte de mettre de côté les habitudes de spectateur occidental ( son rythme comme son montage sont extrêmement déroutants pour une personne peu habituée aux films chinois ), le spectacle est absolument total et l’on ne peut que comprendre la fascination qu’a pu exercer à l'époque Tsui Hark sur des cinéphiles comme Olivier Assayas ou Christophe Gans. Au début des années 90, Tsui Hark enchaînait The Blade, The Lovers, les Il était une fois en Chine et ce Green Snake. Vu le nombre de merveilles qu’il nous a laissé à l’époque, on lui pardonnera mille fois ses derniers opus inégaux. Tsui Hark forever. DVD existant mais méga chiant à trouver, coffret contenant également l'excellent l'Auberge du dragon dont j'ai parlé tout récemment. Full Contact ( Ringo Lam, 1992 ) Jeff ( Chow Yun-Fat ) et Sam ( Anthony Wong ), endettés, font équipe avec le malfrat Junge ( Simon Yam ) et ses hommes pour réaliser un casse, mais Junge les trahit et Jeff est laissé pour mort. L’un des polars les plus célèbres du réalisateur des très bons Full Alert ( surtout ) et City on Fire se révèle une tentative pour le moins curieuse d’œuvre mi-romantique mi-punk, à l’image du biker sympathique joué par Chow Yun-Fat. Le trio de méchants est une sorte d’incarnation du pire mauvais goût possible en matière de cinéma d’exploitation : Simon Yam est un homosexuel plus caricatural tu meurs et ses deux sbires sont pour l’un sorti tout droit de Mad Max 2, pour l’autre une poufiasse totalement nymphomane. Plus ridicules les uns que les autres, ils témoignent d’une époque pas si lointaine ou les pires stéréotypes avaient encore droit de cité dans le cinéma de genre. Là ou les autres polars de Ringo Lam étaient des films au scénario concis mais efficace et à la mise en scène sèche, Full Contact est au contraire un monument d’esbroufe idiote cumulant les bullet-time, les ralentis, les séquences bling-bling et les retournements de situation grotesques ( le comportement de Simon Yam échappe à toutes les lois formant un scénario cohérent ) ; on n’en respecte qu’encore plus les acteurs qui, Chow Yun-Fat en tête, offrent d’excellentes prestations qui tirent le film vers le haut. Notons également une belle photo et un sens du rythme certain qui fait que pour faire simple, parfois c’est débile, parfois c’est absolument n’importe quoi mais au moins ça n’est jamais ennuyeux. Full Contact doit une partie de sa réputation au fait qu’il s’agisse d’un catégorie III, c’est-à-dire un film interdit aux moins de 18 ans, catégorie habituellement réservées aux films érotiques et/ou ultra-violents. Full Contact n’est ni l’un ni l’autre, sa violence n’y est pas plus exacerbée que celle d’un John Woo ( influence manifeste ici ) et en dehors de quelques dialogues outranciers, le sexe s’y fait discret. Quitte à voir un croisement polar noir/cat III, le superbe The Longest Nite du duo Johnnie To/Patrick Yau se révèle bieeeeeen plus abouti et plus mémorable. Cependant, Full Contact est un sympathique divertissement du dimanche soir, plutôt marquant tant pour ses qualités que pour ses défauts. Le Flingueur ( Michael Winner, 1972 ) Arthur Bishop ( Charles Bronson ) est un tueur aux ordres de la mafia, connu pour son professionnalisme. Après avoir assassiné l’un de ses amis jugé indésirable par l’organisation, il prend sous son aile le fils du défunt, Steve ( Jan-Michael Vincent ). Michael " Un justicier dans la ville " Winner est un type pour lequel j’ai une aversion très poussée ( à mes yeux c’est plutôt Michael Loser ) mais je suis obligé de reconnaître que Le Flingueur est un très bon film. Le côté réactionnaire du cinéaste passe mieux dans une histoire melvilienne - l’influence du cinéaste français est d’ailleurs aussi manifeste dans le portrait du personnage de Bronson que dans une longue introduction muette d’un quart d’heure renvoyant au Cercle rouge - et la relation pseudo-filiale Bronson/Vincent est relativement bien développée. Ce qui est étonnant, c’est qu’on sent qu’un cinéaste plutôt commercial comme Winner est rarement aussi bon que lorsqu’il s’éloigne justement de son habituelle complaisance ; la séquence de la tentative de suicide de la copine de Vincent révèle une surprenante sensibilité du cinéaste qui donne un plus évident à son film. Les séquences d’action sont peu nombreuses, pas forcément très justifiées par l’histoire mais sont suffisamment réussies pour le faire oublier, notamment la poursuite en moto. Il est dommage que Winner ne semble pas trop savoir comment conclure son film et que le scénario peine à convaincre tant les ficelles utilisées vers la fin sont grosses. Winner a cherché à expurger le scénario original du sous-texte homosexuel qu'il contenait ( Bronson n'était pas spécialement gay-friendly ), il reste cependant juste assez présent pour que le spectateur un peu tatillon se pose des questions sur le comportement des deux protagonistes, les deux ayant été montrés en début de film comme incapables de tenir la moindre liaison sentimentale avec une femme. Pas un grand film du fait des limites formelles du cinéaste, le Flingueur est un très bon polar 70's bien ancré dans son époque qui n'a pourtant que peu vieilli, et demeure l'un des meilleurs rôles de Charles Bronson. Ca m'apprendra à dire du mal de Michael Winner tout le temps ( RIP à lui d'ailleurs puisqu'il est décédé il y a environ un mois ). Batman ( Leslie H Martinson, 1966 ) Batman ( Adam West ) et Robin ( Burt Ward ) affrontent une terrible conjuration regroupant le Joker, Catwoman, le Pingouin et l’Homme-Mystère. Version cinéma de la série télé kitchissime des années 60, ce Batman ouvertement parodique est difficile à analyser étant donné qu’à l’instar du Retour des tomates tueuses, il s’agit d’un très plaisant nanar volontaire, qu’on pourrait presque juger comme un bon film si tant est qu’on possède un sens de l’humour un chouia déviant. Tout est grotesque : les dialogues feraient passer ceux de Commando pour un monument de sérieux ( le passage de divination de l’identité des méchants est un IMMENSE wtf ), les prestations d’Adam West et surtout Burt Ward sont absolument calamiteuses et le film regorge d’idées plus stupides les unes que les autres telles que le bat-spray-anti-requin-en-mousse, ( passé à l’aide d’une bat-échelle ), la bombe nucléaire vendue par les autorités à un mystérieux homme nommé P.Enguin ou les énigmes légèrement pourries de l’homme-mystère ( " comment partage-on 16 pommes entre 17 personnes ? " " On fait de la compote ! " " Bravo Robin ! " ). Plus encore que le mémorable passage du bat-spray anti-requin, c’est la séquence de la bombe qui a achevé mes zygomatiques ; trimballant une énorme bombe sortie de Mario Bros, Batman court avec celle-ci mais ne peut la jeter nulle part étant donné que des gens innocents surgissent systématiquement au mauvais endroit. Lorsque Batman se décide à la jeter dans la rivière, une famille de canards apparaît alors et Batman ne peut se résoudre à envoyer la bombe au risque d’exterminer les malheureux palmipèdes. Bravo Batman ! Sinon, c’est filmé avec une molesse désespérante, un marsouin sauve Batman en interceptant une torpille, on écrit " PIF " " PAF " et " BOUM " à l’écran lors des scènes d’action comme dans la série télé et le jeu d’Adam West lors du passage de déception amoureuse final vaut son pesant de cacahuètes. Au final, un film extrêmement dur à juger parce qu’à la fois indigne cinématographiquement et en même temps plus drôle que 99 % des comédies. Quant à savoir si on rit du film ou avec le film, je laisse chacun se faire son propre jugement, pour ma part j’ai été plié en deux durant tout le visionnage et c’est bien ça le plus important. Le retour de l’hirondelle d’or ( Chang Cheh, 1968 ) Hirondelle d’or ( Cheng Pei-Pei ), attaquée par des bandits, a été sauvée puis recueillie par un épéiste ( Lo Lieh ). Pendant ce temps, Petit Rock ( Jimmy Wang Yu ), un ancien condisciple d’Hirondelle d’or, cherche à la retrouver et sème des indices menant à elle sur le lieu de ses crimes. Comparer cette suite du classique de King Hu et l’original revient à opposer deux styles, ceux diamétralement opposés de King Hu et Chang Cheh ; plus du tout de réflexion sur le bouddhisme, plus de lenteur calculée ni de chorégraphies proches de la danse mais un supplément de brutalité, d’héroïsme, de violence graphique et de combats à un contre plein de monde. On gagne en efficacité ce qu’on perd en profondeur, même si le personnage d’Hirondelle d’or évite au film de sombrer dans la misogynie de certains Chang Cheh postérieurs. En revanche, l’art de l’action du cinéaste est déjà parfaitement installé et le passage sur l’escalier anticipe l’anthologique combat de fin du Justicier de Shanghai, par exemple. Seule la profondeur émotionelle de La Rage du tigre ou Frères de sang est absente, il faut dire que Jimmy Wang Yu et jeu dramatique vont sensiblement aussi bien ensemble que Marion Cotillard et scène de mort ; j’aime bien Wang Yu quand il s’agit d’imposer une présence physique mais question composition… Cheng Pei-Pei et surtout Lo Lieh délivrent en revanche de très bonnes prestations. Au final, Le retour de l’hirondelle d’or est à mes yeux le meilleur film de la période Wang Yu du cinéaste, avant que l’arrivée du duo David Chiang/Ti Lung au début des années 70 ne le pousse vers des sommets ( la Rage du tigre, Le Justicier de Shanghai, Vengeance… ) parfois moins maîtrisés formellement mais aussi plus tragiques et plus émouvants. Celui-ci a le mérite d’être un des plus accessibles pour un spectateur peu enclin aux gerbes de sang et aux héros mourant durant vingt minutes même si la scène du cimetière me ferait un peu mentir. Dans tous les cas un Shaw Brothers marquant, que je préfère personnellement au premier volet signé King Hu et ou la maîtrise des grands espaces de Chang Cheh et la rigueur des chorégraphies font plaisir à voir. J’adhère. Boris.
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Hors Ligne Membre Inactif depuis le 22/03/2021 Grade : [Nomade] Inscrit le 07/12/2006 | Envoyé par Mendeed le Mardi 26 Mars 2013 à 18:53 J'ai récemment eu l'occasion de voir Dune (David Lynch 1984) attiré par la réputation du bouquin, le nom du réalisateur qui me disait quelque chose et le visionnage récent de la planète des singes vieille version qui m'avait plutot plu en matière de vieilleries SF (désolé pour l'expression).
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