Le 23/01/2018 à 00:39, NorthNikko avait écrit ...
Joker, une question en passant :
Comment tu expliques que tous les enfants dont le niveau est supposé être en chute libre ont
tous des parents qui ont été éduqués "avec les bonnes vieilles méthodes"?
Alors je ne sais pas si l'emploi de "tous" est une pique ou si c'est juste une généralisation involontaire, mais quoiqu'il en soit la question est intéressante sur le fond, et plutôt que d'enculer des mouches je vais essayer d'y répondre.
Considère tout de fois que je ne suis ni sociologue, ni orthophoniste, ni professeur des écoles (même si mon travail y ressemble et que la langue étant le domaine que j'ai étudié, je m'en approche fortement. Du coup je ne suis pas immédiatement concerné par ce phénomène, je le suis plutôt en bout de parcours) et que, contrairement à d'autre
S, il ne me viendrait pas à l'esprit d’affirmer ou de contester quoi que ce soit sans m'être au préalable soit renseigner un minimum par des recherches ou des lectures, soit sans m'appuyer sur une expérience professionnelle aussi bien personnelle que partagée et sans les compétences qui me donneraient légitimité à débattre. C'est donc pour cela que je ne peux que formuler des hypothèses :
-Il y a le parent qui a confiance dans l'institution ancienne et moderne. Ce parent a appris à lire et à écrire avec la méthode syllabique (ancienne) et se dit que ma foi, cette nouvelle méthode avant gardiste doit être tout simplement plus efficace que la vieille recette. Du coup ça ne le choque pas de voir son enfant apprendre d'une façon différente. Malheureusement comme je le disais, on subit seulement maintenant les effets secondaires de la gobale/mixte, donc entre le moment où elle a été posée et le moment où on se rend compte que oups, c'est de la merde, c'est trop tard.
Wiki :
En France, pour Monsieur Tout-le-monde, la méthode globale est une méthode d'apprentissage de la lecture utilisée dans les années 1970, et consistant à enseigner la lecture des mots sans passer par les lettreset les syllabes. Elle est due à Jean Foucambert. Elle a été abandonnée au bout d'une dizaine d'années, après avoir causé un taux d'échecs élevé dans l'apprentissage de la lecture chez les jeunes enfants, et après avoir généré une vive polémique dans la société française.
Le truc c'est que la méthode qui a été utilisée ensuite c'est la "mixte", ou "semi-globale". On a intégré un peu de syllabique mais Colette ouzilou (l'auteur du livre dont je parlais) explique que ça reste principalement du global et que les enfants ont encore des listes de mots à apprendre bêtement par coeur sans savoir ce qu'ils signifient vraiment. De mon point de vue c'est un refus de l’institution d’assumer publiquement son échec, et plutôt que de dire "on a fait de la merde avec la globale, on va revenir à la syllabique" ils ont fait une sorte de demi marche arrière pour calmer la polémique, mais pas trop quand même. C'est pour ça qu'il était vraiment temps qu'un ministre porte ses couilles et annonce publiquement que oui, c'est la syllabique qui est nécessaire. Ca date de cet été, c'est pour te dire la violence du truc.
-Il ya le parent qui n'a pas confiance dans l'institution ancienne : ce parent a peut être eu des difficultés dans son parcours scolaire (malgré son apprentissage avec la syllabique) et du coup il voit dans la nouvelle méthode une sorte de révolution qui va balayer des procédés "archaïques", "dépassés" et qui va applaudir (naïvement) la nouvelle méthode. On retrouve aussi un peu dans ce genre de parent , des gens qui n'aimaient pas lire et qui transmettent (ou essayent) à leurs enfants ce non-goût de la lecture. Cette forme de démotivation ne va pas aider l'enfant dans son apprentissage.
-Il ya le parent qui s'en fout, tout simplement. L'école fait office de garderie, point. Le gamin peut bien apprendre le cours en bourse de la palourde ou la théorie des cordes, peut importe, du moment que le gamin est occupé et qu'il ne fasse pas chier.
-Il ya le parent qui ne s'en fout pas mais qui par humilité (il ne sent pas assez compétent ni savant), ne sait tout simplement pas quelle méthode est la mieux adaptée . C'est un profil de parent inquiet et qui ne s'apercevra que trop tard du désastre. A son grand désarroi.
-Il ya le parent qui se méfie de l'institution moderne et qui va essayer d'apprendre lui-même à son gosse la méthode syllabique. Oui ça arrive. Dans ce genre de profil on trouve soit des parents un minimum renseigné, soit des profs carrément. Le problème : si l’instit utilise la méthode mixte, il va y avoir conflit dans l’apprentissage, et il arrive que le gamin soit perdu en classe à cause de ça. Il y a des parents/profs qui arrivent toutefois à enseigner la syllabique (pendant l'été qui précède le CP par exemple) avec succès, en s'appuyant sur certains livres/manuels pour enfants (ça existe) qui sont spécialisés dans la méthode syllabique. Si l'enfant a suffisamment cerné le truc, il n'aura qu'a "terminer, compléter", son apprentissage avec la mixte et du coup il n'aura pas de dégâts vu que les bases seront saines.
Pour terminer, il faudra dire aussi qu'au sein des professeurs des écoles, il y a eu une division entre ceux qui voulaient garder l'ancienne méthode et les partisants de la méthode mixte, voir globale (oui, hélas).Donc là encore ça peut provoquer des dysfonctionnements chez l'enfant qui n'a pas tout à fait terminer son apprentissage de la lecture en CP avec une méthode A et qui se retrouve en CE1 avec une méthode B.
Rappelons aussi que depuis plusieurs années, le redoublement est interdit sauf pour certaines raisons exceptionnelles (le plus souvent médicales) et que là où un enfant qui avant, aurait lu peu, mal voir pas du tout , aurait redoubler son année, cet enfant-là aujourd'hui passe à travers les niveaux même si son niveau est désastreux. Après je ne dis pas ça pour lancer un débat sur le pour/contre redoublement, mais dans la mesure où "tout le monde passe" même les plus faibles , et que ces élèves ne bénéficient plus d'un temps pour se remettre à niveau, il n'est du coup pas étonnant de voir le niveau baisser (je pense).
Sinon Boris :
C'est peut-être parce qu'un livre a traumatisé ma fin d'année 2017 (la Maison dans laquelle, pour ne pas le nommer)
Tu piques ma curiosité. J'aimerais beaucoup que tu m'en parles, si c'est possible bien évidemment (et sans trop spoiler si possible)